sexta-feira, 17 de setembro de 2010

Pétrole : le Brésil est guetté par le "syndrome hollandais"

Le Monde

L'augmentation de capital de plusieurs dizaines de milliards de dollars annoncée par Petrobras va entraîner un afflux de liquidités étrangères au Brésil. Ce mouvement pourrait faire flamber le réal, la monnaie brésilienne, et étrangler l'industrie nationale. Le Brésil ferait bien de s'inspirer de la rigueur de gestion en vigueur au Chili et en Norvège.

Car l'expérience montre que l'abondance de ressources naturelles attire sur elles les capitaux au point d'en priver les autres secteurs de l'économie, et donc de compromettre l'industrialisation. C'est ce qu'on appelle "le syndrome hollandais" : dans les années 1970, la manne récoltée par les Pays-Bas après la découverte d'énormes gisements de gaz avait provoqué l'asphyxie du secteur manufacturier.

Les dirigeants de nations dotées en richesses naturelles ont aussi tendance à laisser filer la dépense publique, ce qui réveille l'inflation et rend la santé de l'économie dépendante des fluctuations du cours des matières premières.

Conscients du risque

Or, le Brésil est vulnérable. Ses gigantesques réserves de pétrole localisées en haute mer devraient faire du pays l'un des dix plus gros producteurs mondiaux.

Petrobras, groupe d'énergie contrôlé par l'Etat, espère doubler sa production pour la porter à 5,4 milliards de barils par jour à l'horizon 2020. Au cours actuel, cela représente un revenu supplémentaire de 80 milliards de dollars (61,6 milliards d'euros) par an, l'équivalent de la moitié des exportations de 2009. Et ces chiffres ne tiennent pas compte de ce que produisent d'autres grandes compagnies, ou la jeune pousse OGX.

Ceci pourrait déclencher une flambée du réal - il a déjà pris 40 % face au dollar depuis la fin de la crise financière - et mettre en péril les progrès du Brésil dans d'autres domaines. Le pays s'est ainsi taillé des parts de marché mondiales de 1 % dans l'automobile, de 3 % dans l'aéronautique.

Les dirigeants brésiliens sont conscients du risque. Il est question de thésauriser les revenus du pétrole dans un fonds à vocation sociale, en les investissant dans des actifs étrangers. Le procédé permettrait de réduire l'impact de l'afflux de devises et de tempérer l'éventuel appétit de dépense du gouvernement. Soulignons toutefois que même dans les pays qui ont mis en place ce genre de dispositif - le Chili et la Norvège en font partie -, l'envie de puiser dans la cassette se fait pressante.

L'économie brésilienne est bien gérée depuis dix ans, mais avant cela, le pays avait l'habitude de voir les gouvernements céder aux revendications populistes. C'est à l'usage que le Brésil va faire de son trésor pétrolier - "un don de Dieu", selon les termes de son président, Luiz Inacio Lula da Silva -, que l'on va pouvoir juger de sa maturité politique.

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